Speaking in turn Adam Bilardi, Ash Love, Camille Soualem, Gaspar Willmann, Lou Fauroux, Lounis Baouche, Thomas Cap de Ville __3.9–20.9.25
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*English below*

FR.
En découvrant ces artistes et leurs œuvres pour la première fois, j’ai eu l’impression d’entendre un brouhaha familier comparable à celui d’un dîner où l’on ne saisit pas tout, mais où l’on devine que quelque chose se partage. J’ai eu la sensation d’arriver en plein milieu d’un repas de famille, déchiffrant ce qui s'était dit jusqu’à lors en tendant l’oreille par-delà les bruits des couverts et des assiettes. Si chez Platon, dans son banquet, chaque convive développe son propre récit de l’amour, ici, les artistes se retrouvent autour d’une table imaginaire, chacun déposant un fragment de monde. Comme un repas, l’exposition se compose de saveurs dissonantes, de conversations polyphoniques, de récits qui s’effleurent et s’interpellent, sans chercher l’accord parfait.

Certaines voix s’attachent au corps, à ses élans et à ses contradictions. Adam Bilardi peint des étreintes équivoques, suspendues entre tendresse et violence, baignées dans la lumière de l’aube ou du crépuscule. Camille Soualem célèbre, par des corps féminins et non-binaires, l’amitié, le soin et l’amour-propre comme forces de résistance. Ash Love, par la peinture et l'installation, capte les micro-récits affectifs : conversations, représentations, symboles, confidences codées, à décrypter selon la sensibilité de chacun·e. Ensemble, ils composent une discussion sur la façon dont le lien se fabrique et se protège.

D’autres interventions manipulent des traces, des archives ou des signes partagés. Thomas Cap de Ville accumule des souvenirs de jeunesse, ici ses dessins érigent des autels à la mémoire d’une génération, de ses relations et de ses expériences. Gaspar Willmann prélève des images, des formes et des objets du quotidien pour interroger leur circulation dans une société technocratique qui agit sur nos affects. Dans ces gestes, la mémoire personnelle se mêle à la mémoire collective ; le récit intime se fond dans un réseau plus vaste d’images et de comportements.

Enfin, certaines voix convoquent la fiction et les mythologies contemporaines pour interroger notre époque. Lou Fauroux, entre vidéo, sculpture et 3D, démonte les structures de pouvoir en travaillant les codes de la pop culture, des jeux vidéo et de la musique, tout en intégrant son expérience queer pour créer de nouvelles narrations. Lounis Baouche, nourri par l’esthétique de la bande dessinée et du dessin animé, détourne avec humour et poésie les codes sociaux et les archétypes pour interroger les dynamiques de pouvoir et nos imaginaires collectifs.

La scénographie se déploie comme une tablée accueillante et familière, une peinture écoute une vidéo et là un objet s’incline vers une image numérique. Les visiteur.euses circulent entre ces dialogues visuels, entre un murmure et un éclat, comme des convives qui passent de groupe en groupe. Aucune voix n’écrase l’autre, toutes coexistent dans une multitude de voix qui ne demandent qu’à échanger. Chaque artiste met en jeu sa propre histoire tout en créant des ponts avec les nôtres. Rien n’est clos et les œuvres invitent, provoquent parfois, mais ne cessent de proposer une place à la table.

Comme dans tout banquet, l’important n’est pas la conclusion, mais ce qui se tisse entre les paroles. Ici, chaque œuvre est un fragment de discours, et c’est dans leur voisinage que naissent les résonances.

– Florian Mallaisé


EN.
When I first discovered these artists and their works, I felt as though I were hearing a familiar hubbub, like at a dinner party where you don't understand everything that's being said, but you sense that something is being shared. I felt like I had arrived in the middle of a family meal, deciphering what had been said so far by listening carefully above the clatter of cutlery and plates. If, in Plato's Symposium, each guest develops their own narrative of love, here the artists gather around an imaginary table, each contributing a fragment of the world. Like a meal, the exhibition is composed of dissonant flavors, polyphonic conversations, and narratives that touch upon and challenge each other, without seeking perfect harmony.

Some voices focus on the body, its impulses and contradictions. Adam Bilardi paints ambiguous embraces, suspended between tenderness and violence, bathed in the light of dawn or dusk. Camille Soualem celebrates friendship, care, and self-love as forces of resistance through female and non-binary bodies. Ash Love, through painting and installation, captures emotional micro-narratives: conversations, representations, symbols, coded confidences, to be deciphered according to each person's sensitivity. Together, they compose a discussion on how bonds are formed and protected.

Other interventions manipulate traces, archives, or shared signs. Thomas Cap de Ville accumulates memories of youth; here, his drawings erect altars to the memory of a generation, its relationships, and its experiences. Gaspar Willmann takes images, forms, and everyday objects to question their circulation in a technocratic society that influences our emotions. In these gestures, personal memory mingles with collective memory; intimate narratives merge into a larger network of images and behaviors.

Finally, certain voices draw on fiction and contemporary mythologies to question our era. Lou Fauroux, working with video, sculpture, and 3D, dismantles power structures by manipulating the codes of pop culture, video games, and music, while integrating his queer experience to create new narratives. Lounis Baouche, inspired by the aesthetics of comics and cartoons, humorously and poetically subverts social codes and archetypes to question power dynamics and our collective imaginations.

The scenography unfolds like a welcoming and familiar table, a painting listens to a video, and an object leans toward a digital image. Visitors circulate between these visual dialogues, between a whisper and a burst of light, like guests moving from group to group. No voice drowns out another; all coexist in a multitude of voices just waiting to exchange ideas. Each artist brings their own story into play while building bridges with ours. Nothing is closed off, and the works invite, sometimes provoke, but never fail to offer a place at the table.

As in any banquet, what matters is not the conclusion, but what is woven between the words. Here, each work is a fragment of discourse, and it is in their proximity that resonances arise.

– Florian Mallaisé